conf érence Amenés-Pons 7/12
Bridget Copley
bridget.copley at SFL.CNRS.FR
Thu Dec 3 15:35:02 UTC 2009
Le programme "Temporalité : Typologie et Acquisition" (temptypac) de
la Fédération "Typologie et Universaux Linguistiques" du CNRS a le
plaisir d'annoncer un exposé :
"L’imparfait, d’une langue à l’autre : le cas des structures
conditionnelles en espagnol et en français "
José Amenés-Pons (Universidad Nacional de Educacion a Distancia)
Date : 7 décembre 2009
Lieu : CNRS Pouchet (59 rue Pouchet, Paris 75016, métro Guy Môquet/
Brochant, RER Porte de Clichy, bus 66) salle 159
Heure: 14h30-16h30
Vous pouvez consulter la page du groupe temptypac à http://www.umr7023.cnrs.fr/spip.php%3Farticle88.html
, l'agenda du laboratoire Structures Formelles du Langage à http://www.umr7023.cnrs.fr/spip.php?rubrique209
, ou le site web de la Fédération Typologie et Universaux
Linguistiques à http://www.typologie.cnrs.fr.
résumé :
Comme toutes les langues romaines, l’espagnol et le français possèdent
une forme d’imparfait (IMP-IND) qui peut être décrite comme un temps
de passé imperfectif. Cependant, les usages ne coïncident pas
toujours. D’ailleurs, même à l’intérieur d’une seule langue l’IMP-IND
produit des effets de sens fort différents. Une double question
fondamentale vient tout de suite à l’esprit : peut-on tout de même
dire que le sémantisme de l’IMP-IND reste un seul, et qu’il est le
même en espagnol et en français ?
L’utilisation de l’IMP-IND dans les constructions conditionnelles du
type SI + IMP + COND en espagnol et en français est un exemple
paradigmatique de cette situation qui sème le doute.
En espagnol, dans l’apodose conditionnelle, le COND est souvent
remplacé par l’IMP-IND (surtout, mais pas seulement, dans la langue
orale). En ce qui concerne la protase, l’imparfait du subjonctif (IMP-
SBJ) est la forme usuelle, mais l’IMP-IND est utilisé dans certains
cas. Montolío (1999) décrit trois types d’IMP-IND dans la protase : un
usage lié à l’habitude dans le passé (1), un deuxième cas typique du
discours rapporté (2) et un troisième cas sous-standard (3) où l’IMP-
IND prendrait la place de l’IMP-SBJ pour dénoter une condition
potentielle (3) :
(1) Seguíamos hablando en el cuarto de estar o bien en su habitación,
si, por ejemplo, papá estaba acostado, para no molestarle. (Esgueva et
Cantarero 1981)
(2) El profesor me aseguró que si me esforzaba con las matemáticas,
también podría hacer aquella carrera. (Esgueva et Cantarero 1981)
(3) *Ella me puede gritar así porque es la hija de Julio Iglesias. Si
no era por eso no me podía gritar. (CREA)
Veiga et Mosteiro (2006: 192-193) décrivent encore un quatrième usage
de l’IMP-IND dans la protase, qu’ils appellent perspective d’ignorance
(4) :
(4) Si mi tesis era cierta, ¿a qué seguir machacando en hierro frío?
(AYA 205-206)
D’après nous, il y a continuité entre l’IMP-IND de (2) et celui de
(4), qui s’étend aussi à des cas comme (5) et (6), que Montolío (1999)
et Veiga et Mosteiro (2006) ne décrivent pas :
(5) + Al final, ¿Pedro se jubila?
- Pues sí. Hombre, si podía seguir en la misma situación en que
estaba, no se jubilaba, pero al final no le han dado permiso. Total,
que se jubila. (Conversation personnelle)
(6) Hoy también había partido aplazado de la Liga Española. En el
estadio del Molinón se enfrentaban el Sporting y el Betis.
Importantísimo el vuelo para ambos conjuntos. El Betis, porque si
ganaba igualaba en la segunda posición al Fútbol Club Barcelona. (CREA)
Cette continuité porte sur la notion d’usage interprétatif (Sperber et
Wilson 1986/1995), qui recouvre à la fois la citation et l’usage
échoïque : dans (2), (4), (5) et (6) l’IMP-IND introduit une
information qui n’est pas traitée comme la représentation directe
d’une réalité, mais comme une représentation d’une autre
représentation (qui peut correspondre à des mots ou à une pensée).
Tout cela est bien différent en français : l’IMP-IND étant la forme
usuelle dans la protase, aucun de ces effets de sens ne semble
possible. Par ailleurs, la possibilité de remplacer le COND par l’IMP-
IND dans l’apodose est très fortement limitée en français.
Nous nous pencherons d’abord sur l’espagnol. Dans quels cas peut-on
interpréter une citation ou un écho sans un verbe introductif ?
Pourquoi cette interprétation semble-t-elle s’imposer dans (5) et (6),
alors qu’elle ne le fait pas dans (1) et (3) ? Peut-on vraiment
paraphraser (5) et (6) avec des temps du subjonctif ? Quel est le
rapport entre (5) et (6) et la question plus générale de l’usage de
l’IMP-IND dans des reprises cachées et dans des échos (Reyes 1990 et
1994, Leonetti et Escandell-Vidal 2004) ?
D’après nous, les réponses à ces questions sont liées aux classes
aspectuelles et à leur façon de s’associer à l’instruction procédurale
qui constitue le sémantisme de l’IMP-IND (Blakemore 1987, Wilson y
Sperber 1993, Moeschler et alii 1994), et aussi aux hypothèses
contextuelles que l’allocutaire construit ou récupère pendant
l’interprétation.
Ensuite, nous aborderons le cas du français : que deviennent les
nuances que le contraste indicatif / subjonctif introduit dans la
protase espagnole, si ce contraste n’est pas possible ? Par ailleurs,
comment se fait-il que le français n’admet (presque) pas le
remplacement du COND par IMP-IND dans l’apodose, alors qu’il le permet
bien dans des énoncés comme (7) et (8) ?
(7) Il m’a dit qu’il prenait le lendemain un avion pour la Suisse.
(Japrisot: La dame dans l’auto).
(8) Mon sang se glace, dit Magdeleine, quand je songe qu'une minute de
plus et vous n'étiez plus qu' un froid cadavre. (Karr: Sous les
tilleuls)
En espagnol, le fait de disposer d’une forme très active d’IMP-SBJ
peut être exploité pour exprimer l’irréalité. Ceci suffit pour placer
toute la phrase dans une postériorité irréelle. En revanche, en
français l’usage systématique de l’IMP-IND dans la protase rend
extrêmement difficile le remplacement du COND par l’IMP-IND dans
l’apodose, car l’allocutaire a besoin du trait [+/- prospectivité],
effet caractéristique du contraste COND / IMP-IND, afin de fixer la
référence temporelle de l’énoncé. Le besoin de préserver
l’interprétabilité de l’énoncé bloque le remplacement du COND dans
l’apodose en français. Le sémantisme de l’IMP-IND reste donc un seul,
toujours égal à lui-même, en espagnol et en français, même si certains
usages diffèrent.
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